Breizh, O Breathe.

{Un autre début, à voir, si vous aimez j'ai la suite ...}

La vieille entrouvrit la porte et jeta un œil inquisiteur au dehors. L’air du petit matin se dégelait doucement, envahissant. Le flot d’odeurs qui se glissa alors dans la longère est de ceux, si particuliers, auxquels on s’accoutume sans jamais s’habituer. Les senteurs caractéristiques de l’océan, de l’horizon, des vents, et de leur immensité commune, se confondaient dans l’effluve résineux et collant des grands pins. Le soleil se levait à peine, discret à son habitude dans cette partie du monde, et la forêt derrière la maison chantait déjà. Le fourmillement de la vie animale, depuis les entrailles de cette terre humide jusqu’aux cieux limpides, semblait inciter les arbres à sortir de leur long sommeil d’hiver. Ces géants, engourdis par le froid et la fuite de la lumière, se balançaient lentement sous la caresse de la brise côtière. Le printemps s’installait.

La petite femme sortit de chez elle, fermant soigneusement, en se bagarrant comme toujours avec la clé, si tordue qu’il fallait des années d’expérience pour s’en servir. Après avoir vérifié qu’elle n’était pas observée, elle souleva un gros caillou, et glissa la clé dessous. Au moins une demi-douzaine de personnes connaissait l’existence de cette cachette, mais on ne perd pas ses habitudes si facilement. C’était là qu’on rangeait la clé depuis au moins trois générations, et le caillou en portait même la trace. Pas question d’emmener une clé avec soi, on aurait pu la perdre. La vieille récupéra son panier posé à terre en soupirant. Bientôt le trajet serait trop dur pour elle, les forces venaient à lui manquer. Et la petite silhouette s’éloigna vers la falaise, la poussière du chemin s’élevant derrière elle, au milieu de la bruyère fleurissante.